Dans les vidéos d’influenceurs tech, on voit des CPU/GPU alignés prêts à la comparaison. Même RAM, même vitesse, même GPU, même résolution, même scène de test, le tout sur un Windows fraîchement nettoyé. Résultat : des conclusions tranchées, nettes, et très partageables. Ça fait rêver… mais ça déforme un peu la réalité. Ce qu’ils mesurent, c’est un scénario idéal. Ce qu’un joueur vit, c’est un écosystème complet, avec de sacrés grains de sable. Entre les jeux mal optimisés, un Discord en fond, un vieux SSD avec une installation Windows qui a vécu et une RAM pas toujours à la pointe, on est loin du labo.

Un exemple

On peut prendre un exemple concret : un 12400F face à un 7500F. Dans un bench propre, le 7500F écrase le 12400F en esport 1080p low. Dans certains jeux très “mono-thread”, c’est presque un massacre. On peut empirer la donne en remplaçant la RAM d’AlderLake par de la DDR4. En conservant le ventirad stock, et l’écart devient encore plus violent. En termes de tarifs aussi, même avant la situation « actuelle » de tension sur la ram. Pour moins de 100€ sur Amazon on trouve un 12400 avec iGPU et ventirad, jusqu’à il y a peu. Pour 50€ on avait 16 Go de DDR4. Il faut compter 150€ pour un Ryzen 7500F (190€ pour un 9600 qui aura une puce graphique) parfois sans ventirad. Auquel il fallait ajouter 150€ de DDR5.

Est-ce que le double du tarif offre le double de performance ? Non, car, dès que l’on revient à une situation réelle, par en 1440p même medium, avec un GPU type RTX5060 chargé à 99 % (voire à 110 % de VRAM), l’écart fond comme neige au soleil, et parfois la situation s’inverse. Du moins tant que la VRAM n’a pas explosé.

La morale n’est pas “ils mentent”. La morale est “leurs conclusions décrivent leurs conditions”.

Un métier difficile

Je ne suis pas en train de les accuser d’arnaque façon marchands de tapis. Ils testent du matos dans des conditions ultra-maîtrisées, parce que c’est précisément leur job : isoler une variable, la pousser, mesurer son comportement. Le problème, c’est que beaucoup de gens prennent ensuite ces conclusions comme des lois universelles, alors qu’en vrai, l’écosystème du joueur moyen est bien plus chaotique.

Et puis il y a un point rarement évoqué : la scène de test. Un benchmark, c’est une chorégraphie parfaitement répétable. Une zone prédite, sans météo ou lumière dynamique (en low…), sans explosion de particules par surprise. Dans un jeu réel, tu alternes un menu, un combat, une cinématique, un open-world qui charge des assets à la volée avec discord en fond et parfois un navigateur ouvert. Bref, la réalité est parsemée de sous-systèmes très différents. Ce qui limite un bench ne limite pas forcément une vraie partie, et inversement.

Loin de la réalité

Autre point intéressant : le reste de la machine. La plupart des influenceurs utilisent des GPU à 2000 € sur des plateformes qu’on retrouve dans des configs complètes vendues moins de 800 €. Et soyons honnêtes : la majorité des joueurs ne cherche pas 400 FPS en mode entraînement dans CS2. Ils veulent un PC agréable, stable, silencieux, qui tient sa route dans leur résolution habituelle.

En gardant tout ça en tête, la nuance devient un outil précieux. On peut regarder les comparatifs, en tirer des tendances, mais toujours en remettant les cartes dans le bon sens : dans mes jeux, dans ma résolution, avec mon GPU. C’est là que se trouve la vraie performance, celle qui compte. Et c’est là que les conclusions des influenceurs redeviennent ce qu’elles sont vraiment : des signaux utiles, pas des lois gravées dans la pierre. Les benchmarks sont des indicateurs, pas des prophéties.

Le contre-exemple

Quand on regarde des cas réels, ça devient encore plus croustillant. Prenons un exemple très actuel : le 8400F. Sur le papier, en benchmark propre, il colle un joli uppercut à pas mal de CPU et met même le 14400F dans l’embarras dans les cas très « CPU-limited » en jeu. Sauf que dans la vraie vie, ce petit 8400F a ses limites. Avec ses lignes PCIe réduites et une RTX 3070 déjà à bout de VRAM, les choses se compliquent très vite. Tout va bien pendant dix minutes de test. Mais au bout d’une heure, quand la VRAM est saturée, que le PCIe 8x devient un goulot d’étranglement (ça aurait été pire en DDR4), le 14400F pourtant moins impressionnant sur le papier devient nettement plus stable en jeu prolongé même en DDR4.

Même scénario dans Arc Raiders, Cyberpunk ou Battlefield 6. Des titres modernes, bien optimisés, mais très complexes. En 1440p, même en medium, une RTX 3060 est déjà à 100 %, et peu importe le CPU : les performances deviennent strictement dépendantes du GPU. Quand on arrive d’un i7-6700 ou d’un Ryzen 1600X ou d’un 10100F, la vraie question n’est pas “quel CPU met 10 % dans la tête l’autre en benchmark d’esport”, mais “quelle upgrade apporte un vrai gain sans pulvériser le budget ». On se fiche un peu de préparer la prochaine plateforme. Vu ce que l’on a déjà tenu avec celle-là.

Entre un 8400F et un 14400F, pour un joueur en 1440p avec une 3060 ou une 5060, la réponse est presque toujours plus simple que les tableaux de benchmarks : prendre le moins cher, surtout si on a déjà de la bonne DDR4. On garde le budget pour une future carte graphique et on profite du fait qu’à cette résolution, les écarts CPU disparaissent dans 90 % des cas. Le GPU fait la loi, et le CPU… suit la cadence sans trop d’histoires. D’ailleurs a priori, il n’y a aucun intérêt spécifique à chercher le 8400F pour une RTX2060/3060, le Ryzen 5600 ferait tout aussi bien.

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